Le monde n’a pas attendu Hitler pour balayer d’un revers de la main l’idée d’un genre adamique enraciné dans l’appareil psychique de la personne humaine car irréductiblement individuant, irréductiblement auto-esclavagiste, irréductiblement libre de profiter du divan de l’auto-analyse dès l’instant que la Tête de mort des unités ne s’est pas mise en travers de la porte de sa moissonneuse-rêveuse. La Banlieue Est de l’Europe est à feu et à sang. Il serait temps de se soucier du fait que la mise en place d’un superplan banlieue à x milliards de dollars nous interdirait jusqu’à l’éventualité d’un bâclage dudit superplan. Et par bâclage, j’entends cette forme d’impartialité postcollaborationniste que l’on instaure çà et là entre la liberté et le fascisme, entre Rushdie et l’homme qui, en sa présence, ne peut pas réprimer son réflexe d’obéissance à l’ordre ambiant de se lever de sa chaise, les yeux injectés de sang, prêt à écrabouiller la face qui ose cracher sur ce qui, somme toute, n’est qu’une image que l’homme s’est faite d’une réalité dépassant de très loin son entendement.
Tous ceux qui ont marché, en 2012, contre le djihadisme et l’antisionisme (prudemment rebaptisés racisme et antisémitisme) pensèrent tout bas ce que la survivante Loridan-Ivens eut le courage de dire tout haut, à savoir que les attentats de janvier, s’ils s’étaient résumés à l’exécution sommaire des coupables nés de la porte de Vincennes, n’auraient jamais mobilisé 4 millions de Français considérant qu’il se serait agi là d’une énième exportation d’un conflit israélo-palestinien qui, non seulement, ne les concerne pas, mais commence, sérieusement, à leur taper sur le système. Contre cela, je ne peux que partiellement m’inscrire en faux. Car la prise d’otage de l’Hyper Cacher opposa bien des Français d’origine judéenne à de nouveaux nazis. J’ajoute que la fusillade de Charlie Hebdo fut elle aussi, et ce n’est pas les martyrs de la libre pensée qui me contrediront, une confrontation exemplaire entre un réseau de résistance antifasciste et la Nasserjungend.
— Non, non.
— Si, si.
— Sissi est laïque!
— Erdogan est laïque.
— L’Égypte a fait la paix avec Israël en 1979.
— Les Palestiniens ont fait la paix avec les Israéliens en 1993.»
Mais ne vous méprenez pas. Ce qui ne vous allonge pas une droite peut très bien vous prolonger par votre gauche. Aussi, prenez garde à la première marche que représenterait, pour le plus rapide des prétendants à la succession mahométane, la reconquête de l’Ithaque juive. Israël est une porte ouverte sur l’Occident. Une porte par laquelle passeraient — sur le corps du monde arabe — et avant même qu’ils n’aient pu célébrer leurs noces incestueuses précipitées, les deux frères ennemis que sont pour nous le panarabisme et le panislamisme armé. De l’aigle impérial du drapeau palestinien au croissant sunno-chiite finançant sa guerre sainte, il n’y a que Boniface pour croire aux intentions pacifiques du Désaxe, à moins que l’antipape du pacifisme ne nous réserve une petite quenelle à la Bloemfontein 2010, allez savoir…
Contrairement à l’immaculante préconception, et ce jusqu’à la dernière fraction de seconde avant la sublimation des temps, la division fait la force. Je vous propose donc de vous éclabousser au-dessus du Déluge. Je vous propose de faire monter dans l’arche l’animalerie totem au grand complet. Je vous propose, à vous Arabes, musulmans ou non, vous musulmans, arabes ou pas, de ne plus minorer l’influence du puissant organe de contre-propagande qui s’offre aux recycleurs des vies à un instant de notre histoire où quelques uns d’entre nous commencent de se demander si le cœur de la liberté, qu’ils feignent d’avoir conservée intacte, ne continuera de battre qu’au sein d’une société secrète éclairée loin du monde… le plus loin possible… pour combien de temps… encore ici… avec moi… où çà… quand suis-je…
Soros a fui la barbarie stalinienne après avoir miraculeusement glissé entre les bottes d’Eichmann, lequel architecte de la Solution finale avait fait déporter 400 000 de ses compatriotes, et quelque chose me dit qu’il n’a pas oublié la semi-dictature de l’amiral Horthy et son antisémitisme hitléro-compatible. Quelque chose me dit que la promulgation du numerus clausus des Juifs sous le royaume sans roi remuera toujours l’adversaire viscéral de l’Apartheid, hier en Afrique du Sud, aujourd’hui en Poutinie centrale. Miser sur l’Euromaïdan représente pour lui un risque de naufrage sagement verrouillé, une chance de remise à flot éclairée par son estimation de la valeur de dépression qu’attribue aux libertaires le semi-diktat des rois sans royaumes, gibier de potentiel prédestiné à gésir debout, lapins de garenne dans les phares de l’EnTube. Si la plupart d’entre nous sont nés après lui, son vécu en a pénétré quelques uns qui ne demanderont pas à repasser par la première moitié du XXe siècle pour admettre qu’une gestion terroriste du Produit international brut ne sauvera pas les travailleurs de tous les pays. À tout le moins, la balançoire totalitaire aura mis un terme à notre valse hésitation concernant les causes du malaise dans la citoyenneté. L’injustice procède de l’injuste et la justice du juste. Et la misère ne fournit aucune garantie d’accroissement de l’indice de discernement. La réduction de l’homme à la terre qu’il peuple est une négation de ce sur quoi s’arc-boute notre méta-État : la libre entreprise des fouilles de l’inconscient collectif. L’intérêt-général-roi tue l’intérêt-général-citoyen. En cela, et parce que la mainmise du citoyen-roi sur les finances mondiales achèverait de dérégler le jeu démocratique, on peut dire que le populisme est l’ultime forme de ploutocratie.
L’arrivée en force de la gauche radicale au sein d’une assemblée supportant la présence, dans ses rangs, de 18 députés néonazis ne devrait nous rendre ni béats ni malhonnêtes. Nous nous en réjouirions sans doute si elle ne nous rappelait pas, si violemment, l’affrontement arithmétique des deux totalités nazies et soviétiques. Désormais aux affaires, Varoufakis va pourvoir mettre fin à des années d’austérité à l’allemande. À lui de nous prouver que misère ne rime pas forcément avec antisionisme et qu’athéologie de la libération ne procédera pas, comme chez le nucléarisateur du chef spirituel des Aryens, d’une replanification de la conférence de Wannsee. Nous attendons avec impatience qu’il nous montre le chemin.
— Pourquoi voulez-vous qu’un lecteur assidu de Chomsky se sente concerné par l’antisémitisme?
— Comment voudriez-vous que les Nations unies organisent, par les forces de l’être ou la force des choses, une séance plénière exceptionnelle sur la montée de l’antisionisme dans le monde?»
Entre les continents à la dérive, Charlie et la chocolaterie ukrainienne, loin d’incarner le diable de notre temps, symbolisent la victoire remportée par un démocrate sur la Kolyma et la Shoah par balles mais aussi la grenade Svoboda qui, merci à lui, explosa à la gueule de l’électorat néonazi lors des élections du 25 mai dernier. Le superplan de sauvetage de l’Ukraine ne peut se permettre un geste incontrôlé de l’esprit qui engendrerait l’avalanche de trop, celle des nanoplans Marshall successifs nous condamnant à observer, vaincus par nos petites lâchetés, l’inexorable radicalisation des nations. L’Ukraine s’est libérée de la double barbarie du communisme et du nazisme et ce n’est pas la libération du camp d’Auschwitz par une Armée rouge ayant initialement parié sur la paix germano-soviétique qui nous fera fermer les yeux sur ses crimes parahitlériens. Désormais, il nous appartient, à nous Européens, de préserver ce que l’Ukraine ne serait jamais parvenue à sauver sans notre soutien conscientiel. Sa victoire contre le froid sera notre victoire.
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Par : Asermourt
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